Le
Général de Langlade
Par
le général H . du HAYS.
Le général de division Paul Girod
de Langlade est décédé le
16 janvier 1980 et, depuis cette date déjà
lointaine, rares ont été les occasions
où sa mémoire a été
évoquée. Il est cependant un des
chefs marquants qui ont eu leur large part à
la formation et aux victoires de la 2e division
blindée. Mais il y a aussi bien d'autres
belles pages dans sa longue et prestigieuse carrière
tout entière consacrée au service
de la France. Elle mérite d'être
rappelée, elle a valeur d'exemple
. Né
en 1894, Paul de Langlade s'engage en 1913, à
19 ans, au 3e régiment de chasseurs à
cheval ; au début de la guerre, il est
maréchal des logis. Lorsque le front se
stabilise et que s'installe la guerre des tranchées,
la cavalerie n'a plus guère de rôle
à jouer, il rejoint alors l'infanterie
sur sa demande et est affecté au 69e B.C.P.
Il est nommé sous-lieutenant en 1915 et
en septembre, il est blessé grièvement
à la Ferme de Navarin.
II passe ensuite dans l'aviation, où, sa
brillante conduite lui vaut citations et avancement
rapide. A la fin de la guerre, pilote, commandant
une escadrille de bombardement de nuit, il est
promu capitaine à titre temporaire, sept
fois cité, chevalier de la Légion
d'honneur. Il a 24 ans.
Il réintègre en 1923 son arme d'origine,
la cavalerie, et, capitaine à titre définitif,
il part en 1927 pour le Maroc où il participe
à la pacification de territoires encore
insoumis. Il est encore deux fois cité.
Il restera au Maroc jusqu'à la guerre.
C'est alors qu'il rencontre le lieutenant de Hauteclocque,
cette rencontre laissera chez chacun d'eux un
souvenir durable.
En 1934, il est officier de la Légion d'honneur
et promu au grade de chef d'escadrons en 1936.
A son grand regret,
en 1940, c'est en Tunisie que son régiment,
le 1er R.C.A., reçoit comme mission de
défendre la ligne Mareth où aucun
adversaire ne se manifestait. Paul de Langlade
n'en ressent que plus douloureusement la défaite.
En 1941, il est désigné pour prendre
le commandement du Groupe autonome du 1er chasseurs
d'Afrique qui deviendra, en 1942, le 12e groupe
autonome de chasseurs d'Afrique . Formé
au Sénégal, ce groupe comprend :
un escadron de commandement et des services, un
escadron motocycliste et, surtout, un escadron
de 23 chars Somua, le seul existant alors dans
l'armée française. Ces chars ont
été embarqués à Marseille,
avec l'accord des commissions d'armistice, sous
le prétexte de renforcer la défense
du Sénégal, mais ses équipages
ont en tête une idée bien différente
sur l'utilisation future de leur escadron.
En vingt mois au Sénégal, malgré
un climat éprouvant - le capitaine de Verdelon
et plusieurs chasseurs y mourront - le chef d'escadrons
promu lieutenant-colonel en 1942, en gardant le
souci constant de maintenir la santé et
le moral de ses hommes, réussissait à
faire de son groupe une unité soudée,
instruite, dans l'attente impatiente de sa future
mission : la reprise du combat contre l'Allemagne.
Dans cette tâche difficile, il sera admirablement
secondé par des cadres de valeur au nombre
desquels il convient de citer le capitaine Rouvillois,
futur vainqueur de Baccarat et de Strasbourg,
le lieutenant Gribius qui sera le chef du 3e bureau
de la division, l'adjudant chef Titeux, . président
des sous-officiers, remarquable chef de peloton
de chars.
L'heure tant attendue de tous arrivait enfin après
le débarquement allié en Afrique
du Nord : le 12e groupe autonome de chasseurs
d'Afrique y était ramené et l'escadron
Somua aussitôt dirigé sur la Tunisie
participait aux combats contre l'Axe donnant ainsi
son premier titre de guerre et de gloire au 12e
R.C.A. qui venait naître.
En juin 1943, le
lieutenant-colonel de Langlade, rencontre fortuitement
le général Leclerc; l'un et l'autre
se souviennent de s'être connus au Maroc,
quelque quinze ans plus tôt. Au cours de
la conversation, le général proposait
à Langlade de faire affecter son régiment
à la division qu'il allait former. Langlade
acceptait avec un enthousiasme qui sera partagé
par le 12e R.C.A. et le 12e Cuirs qui en dérivera.
Pendant les mois d'organisation
et de préparation de la division qui suivaient,
le colonel de Langlade, promu en septembre 1943,
passait le 1er juin suivant le commandement du
12e R.C.A. au chef d'escadrons Minjonnet et prenait
celui d'un groupement tactique, le G.T.L.
Il y régnait d'emblée une parfaite
entente entre les cadres F.F.L. du II/R.M.T. et
ceux des unités de l'armée d'Afrique,
destinés à combattre côte
à côte, et animés d'une volonté
commune : chasser l'ennemi de France.
Les faits d'armes du G.T.L. pendant la campagne
de libération sont bien connus : la forêt
d'Ecouves, Paris, Vittel et Dompaire, la traversée
des Vosges, Saveme et les Quatre Vents et combien
d'autres !
Son chef était fait commandeur de la Légion
d'honneur en septembre après Dompaire et
nommé général de brigade
le 25 décembre 1944. Du ler janvier au
début février le G.T.L. sera partout
sur la brèche, en Lorraine pendant 3 semaines
dans des conditions les plus difficiles, puis,
de nouveau en Alsace, à Kilstett et ensuite
vers NeufBrisach où s'achevait la réduction
de la poche de Colmar. C'était enfin à
Royan que le général de Langlade
représentant le général Leclerc
auprès du Commandant du front, livrait
son dernier combat au sein de la 2eD.B.
La guerre terminée, la brillante carrière
du général de Langlade ne s'arrête
pas sur cette page de gloire. D'abord gouverneur
de Strasbourg, il commande ensuite, de 1947 à
1950, l'école d'application de l'arme blindée
et de la cavalerie qui vient de rouvrir à
Saumur.
" Il y marque son passage, écrit
Gribius, alors à l'encadrement de l'école,
par le goût des réalisations concrètes
et par sa volonté de passer le message
de tout ce qu'il a appris à la tête
du G.T.L. ".
En 1948, il est élevé
à la dignité de Grand Officier de
la Légion d'honneur.
Puis il retourne dans son cher Maroc où
il prend le commandement de la division de Casablanca
et est promu général de division,
mais l'Indochine l'attire, il demande à
y servir et la rejoint en juillet 1952.
Nommé Commandant supérieur des forces
terrestres du Cambodge, il y noue des relations
amicales avec le Roi, le prince Norodorn Sihanouk.
Celui-ci, exilé mais fidèle, sera
présent aux obsèques de celui qu'il
a connu et estimé dans des temps plus heureux.
En 1954, général
de division, titulaire de seize citations, Paul
de Langlade, atteint par la limite d'âge,
quitte le service actif après plus de 40
ans et se retire dans son Auvergne natale, il
écrit alors ses souvenirs de compagnon
d'armes du général Leclerc au sein
de la 2e division blindée : " En suivant
Leclerc ".
Mais sa retraite sera marquée par de cruelles
épreuves familiales : après le décès
de sa fille, madame de La Tour, son fils Didier
est tué en Algérie, enfin son épouse,
la baronne de Langlade, le précède
dans l'au-delà. Comme en toutes autres
circonstances, il fait face avec courage.
En 1965, il est élevé à la
dignité de Grand Croix de la Légion
d'honneur.
Tel fût le général
de division Paul Girod de Langlade. Sorti du rang
et n'ayant connu que l' " école de
la guerre ", il a vécu une longue
carrière aux multiples facettes au cours
de laquelle il n'a cessé de donner des
preuves de sa valeur militaire et humaine
Mais, pour les anciens des 12e R.C.A. et 12e Cuirs,
son acte le plus décisif, pour lequel ils
lui sont et seront toujours profondément
reconnaissants, c'est d'avoir dit " OUI "
à Leclerc. Grâce à ce oui,
ils ont l'honneur et la fierté d'avoir
combattu au sein de la prestigieuse 2e division
blindée.
Biographie
© Fondation
Maréchal Leclerc de Hauteclocque
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